Lors de la Révolution, la dispersion des ouvrages de la bibliothèque des avocats a suivi de peu la suppression de l’Ordre décrétée par l’Assemblée nationale. Sous le Premier Empire, le processus s’opère pour ainsi dire en sens inverse : c’est après avoir autorisé le legs par un avocat à ses confrères de ses livres de droit que Napoléon Ier se décide à rétablir l’Ordre. Comme on le voit, la destinée du barreau est indissociable de l’histoire de sa bibliothèque.
Un siècle après Gabriau de Riparfons, un autre membre du barreau, Nicolas Férey, prend à son tour l’initiative de léguer ses livres à l’Ordre des avocats. Lorsqu’il rédige son testament en 1806, il n’existe cependant plus (ou plutôt pas encore) d’organisation professionnelle susceptible de recevoir ce legs. Férey décède en 1807 et la question se pose alors de l’exécution de ses dernières volontés. Un décret impérial de 1808 déclare le legs recevable et laisse espérer une prochaine restauration de l’Ordre des avocats. Dans l’espoir de hâter celle-ci, les confrères de Férey lui rendent hommage au cours d’une cérémonie à laquelle assiste le Prince Cambacérès, proche de Napoléon. Le discours prononcé en la circonstance a été imprimé et somptueusement relié aux armes du Prince (reproduction). Elles se distinguent notamment par un bras tenant les tables de la loi, surmonté d’un semis d’abeilles.
Quelques mois plus tard, le 14 décembre 1810, Napoléon signe le décret rétablissant les ordres d’avocats et réglementant la profession. Les livres de Férey forment alors le noyau de la nouvelle bibliothèque du barreau de Paris. Contrairement à leurs prédécesseurs de l’Ancien Régime, les avocats du XIXe siècle parviennent à trouver refuge au cœur du Palais, dans de modestes locaux donnant sur la cour de la Sainte-Chapelle. À l’inverse de sa devancière, cette nouvelle bibliothèque n’est pas publique, mais réservée aux membres du barreau. Elle n’est pas seulement un lieu d’études : ses locaux accueillent également les séances du concours d’éloquence de la conférence et les réunions hebdomadaires du Conseil de l’Ordre. En peu de temps, elle s’impose comme l’un des centres nerveux de la vie du barreau. À la suite du legs de Férey, elle ne cesse de s’enrichir d’ouvrages concernant les matières les plus variées ; son catalogue imprimé en 1866-1867 comprend plus de 10 400 notices, correspondant à plus de 26 000 volumes. On y trouve naturellement de nombreux livres de droit mais aussi de religion, sciences et arts, littérature, histoire et géographie. Ce patrimoine va connaître une douloureuse épreuve en 1871, lors de l’incendie du Palais de Justice.
Le portrait de Férey vous invite à consulter son testament et les termes en lesquels l’empereur l’a déclaré recevable. Derrière la représentation de Napoléon Ier, vous découvrirez les détails de la cérémonie de 1810 qui fut le prélude à la reconstitution des ordres d’avocats la même année. L’avocat anonyme plongé en pleine lecture se propose de vous faire découvrir la bibliothèque telle qu’elle existait avant le drame de la Commune.
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