« Ce fut la plaidoirie de ma vie », dira plus tard Monnerville. Un bref rappel de cette « cause célèbre » ne peut que lui donner raison. Jean Galmot, d’origine périgourdine, était arrivé en Guyane en 1906. Il y avait fait fortune dans le commerce, notamment du rhum.
Attentif à la condition misérable des Guyanais, il avait acquis une popularité considérable en travaillant concrètement à l’amélioration de leur sort. En 1919, il est élu député de Guyane. Mais peu après, ses affaires périclitent ; il fait l’objet de poursuites judiciaires et subit une lourde condamnation. Celle-ci n’est pas encore définitive lorsque Galmot tente d’être réélu député en 1924.
Les autorités locales lui opposent alors un « candidat officiel », élu de justesse et dans des conditions douteuses. Galmot ne désarme pas et appelle à voter en 1928 pour le candidat qu’il soutient. La réélection (controversée) du député sortant suscite la colère des partisans de Galmot.
Bientôt, la mort de ce dernier (maladie ou empoisonnement ? Le doute demeure) suscite une violente émeute à Cayenne, qui fait plusieurs victimes. Les auteurs présumés des lynchages sont traduits devant la Cour d’assises de Nantes (1931). Monnerville est, avec Henry Torrès, l’un des organisateurs de leur défense. Douze avocats assistent les quatorze accusés.
La plaidoirie de Monnerville, seul avocat originaire de Guyane, allie la force de l’émotion à la rigueur judiciaire : s’ils sont coupables, les accusés ne le sont pas plus que les dix mille Guyanais qui ont participé aux émeutes ; et le vrai coupable, n’est-ce pas plutôt le pouvoir colonial, qui viole le scrutin populaire pour imposer son candidat ? Les accusés sont acquittés. Monnerville est désormais célèbre. Aux Antilles et en Guyane, il est fêté en héros. L’année suivante (1932), il est élu député de Guyane. C’est le début d’une longue carrière politique ; mais Monnerville demeurera toujours avocat dans l’âme, « sacerdos in aeternum ».
La plaidoirie de Monnerville est consultable sur le site de la Société des amis du Président Gaston Monnerville |